maestro Collardo

le traître honorable

Maitre collard 01 minLe procès fut comme l'instruction  : une succession de malchances pour christian Ranucci.

Au point qu'au moment de plaider son avocat devint aphone.

 

Mais un autre eut toute sa voix pour tenter de sauver la tête de l'accusé.

Quand bien même on lui avait demandé le contraire

 

 

 

 

Maitre collard 02 min1 - vedettariat

 

Qui aurait pu imaginer que l'affaire Ranucci engendrerait 2 personnages aujourd'hui star ?

Le second juge d'instruction et l'avocat de la défense.

 

L'un, tombé sous les balles de truands, a ressuscité de manière virtuelle au cinéma. Avec l'étoffe d'un héros, et jean Dujardin comme dernier interprète. L'autre, toujours bien vivant, est une vedette des plateaux de télévision.

 

Pour ne pas ternir l'image du juge d'instruction devenu héros du grand écran, on évite d'évoquer son rôle dans l'instruction dans l'affaire dite du "pull-over rouge". Pourtant, témoin dans une exécution capitale, voilà qui n'est pas banal dans la vie d'un homme !

 

En revanche, maître Collard qui représentait la partie civile, ne cherche nullement à taire son action dans l'affaire. Cet épisode de sa vie nous éclaire judicieusement sur le rôle qu'il tient aujourd'hui.

 

 

 

Maitre collard 03 min2 - le débutant

 

En 1974, gilbert Collard n'est pas encore le chouchou des émissions télé que nous connaissons tous.

Cet "ambianceur" génial qui en 2-3 tirades vous transporte un débat oiseux et entendu vers une joute verbale passionnée.

 

A l'époque, seuls quelques journaux avaient cité son nom dans un procès pour viol où il avait fustigé la naïveté et l'inconséquence des plaignantes.

 

En 1974, l'avocat de 25 ans n'a pas de cabinet. Et il n'a même pas le téléphone !

Et pour entendre au bout du fil "maître Collard, avocat", il faut composer le numéro ... du bistrot où il a ses habitudes.

 

Comment le quasi-novice en justice pénale s'est-il vu confié un dossier aussi grave, à retentissement national ?

C'est un éminent confrère qui lui refile l'affaire.

 

 

 

Maitre collard 04 min3 - le remplaçant

 

Dans un 1er temps, les parents de la petite victime s'adressent à un professionnel chevronné : maître Pollak.

Rien à voir avec le trublion médiatique qui déchaînait les débats télévisés dans les années 80. Il s'agit ici d'un homonyme. 

 

D'emblée, maître Pollack annonce à ses requérants qu'il est opposé à la peine de mort. Il refusera de la demander s'il doit plaider au procès.

 

Face à ce "no passaran" droit-de-l'hommiste, le couple d'espagnols n'en démord pas : ils veulent "la muerte".

 

"Si vous ne voulez pas d'un avocat qui ose dire qu'il est contre la peine de mort, je peux vous adresser à quelqu'un d'autre."

 

Effectivement, maître Collard omit de dire, et pendant presque 2 ans, qu'il était lui-aussi un farouche adversaire de la peine capitale. Et il entendait bien mettre ses principes en application.

 

Mais comment le cacher à des clients qui veulent l’assurance que la mort soit réclamée ? Maître Collard est certes un débutant, mais certainement pas un naïf …

 

 

 

Maitre collard 05 min4 - la parade

 

On ne peut pas être totalement sûr de la manière dont maître Pollak réalisa son subterfuge.

Mais on est en revanche certain que gilbert Collard, pourtant déjà verbalement très prolixe, teint bon dans son silence sur ses intentions finales : demander l'indulgence des jurés.

 

Fit-il réellement mystère de ses convictions morales concernant ce que le président de l'époque dénommait "le châtiment suprême" ?

Ou usa-t-il de sa faconde pour emberlificoter ses clients ?

Il n'en eut nullement besoin. Il lui suffisait de s'abriter derrière un argument juridique purement technique.

 

"Ce n'est pas à l'avocat de la partie civile de demander la peine de mort. La sanction est laissée à l'appréciation des jurés. Le rôle de l'avocat doit se cantonner à établir de manière claire la culpabilité pour qu'ils puissent se déterminer en conséquence." 

 

Gilbert Collard attend donc patiemment le procès pour se révéler. Et même la toute extrémité de son intervention, à savoir la phrase finale de sa plaidoirie.

 

 

 

 

 

Maitre collard 06 min5 - trahison

 

   "Je veux que Ranucci

   se souvienne de son crime..."

 

Avec cette supplique lancée au tribunal d'Aix-en-Provence le 10 mars 1976, gilbert Collard demande clairement aux magistrats comme aux jurés de ne pas condamner l'accusé à mort.

 

Seul le père de la victime est venu au procès. Son épouse s'est abstenue.

Comment encaisse-t-il cette déclaration impromptue ?

Sa seule fille a été assassinée à coup de pierre et de couteau. Il vit depuis des mois le martyr chaque jour. Et voilà qu'on vient le poignarder dans le dos !
 

A ses yeux, ce ne pourrait-être qu'une trahison.

Sa colère murira dans les jours qui suivront le procès, avant qu’il ne passe à l’action …

 

 

 

Maitre collard 07 min6 - empathie

 

Mettons-nous un instant à la place du malheureux père de famille.

Voilà presque 2 ans que lui et son épouse ont mis entre et les mains et les mots de cet avocat toute leur confiance.

 

Deux années de souffrance au jour le jour, avec pour seul espoir que justice leur soit rendue. Selon une méthode qu'ils souhaitent certes "radical". Mais elle leur est a priori justifiée, pour la bonne raison que la loi la prévoit.

 

Des mois et des mois à avoir pour interlocuteur, mais aussi confident et soutien moral celui qui en réalité pratique un double jeu. Et le fourbe attend le moment où ils ne pourront plus rien faire pour révéler son propre plan : sauver la tête de l'accusé !

 

A croire qu'il n'est pas là pour défendre les victimes.

 

Ce maître Collard doit cacher un lourd secret pour que l’on puisse expliquer une telle attitude …

 

 

 

Maitre collard 08 min7 - chienlit

 

En 1976, le Front National est un groupuscule qui a fait 0,75% des voix aux dernières élections présidentielles.

Notre brave boulanger, père de la victime, n'y a pas encore ses accointances.

Mais comment peut-il percevoir son avocat ?

 

Le jeune avocat chevelu avait pile 20 ans en mai 68. Il a bien l'allure d'un pur produit du gauchisme.

Son phrasé emprunte la forme du slogan. Loin des pédants ou précieux qui manient la citation latine, lui préfère les formules choc destinées à marquer les esprits :

« Des décorations, pas de pension !»

C'est ce qu'il martèle pour défendre un ancien combattant à sa 1ère plaidoirie connue.

 

Puis arrive au procès Ranucci sa réplique imparable :

« Pas de dédicace, on a déjà une épitaphe ! »

 

Et encore bien plus tard :

« Des salles de shoot ? Et pourquoi pas des chambres de viol ! »

 

Sur la forme, il lance ses tirades comme on envoie des projectiles sur les forces de l’ordre. Projectiles qu’il a pu admirer au château familial de son enfance, aujourd’hui centre d’instruction pour les CRS. Et c’est l’œil brillant de fascination qu’il évoque ce petit musée improvisé. Les effrayants objets récupérés où confisqués aux manifestations sont exposés dans l'ancienne chapelle du domaine.

 

D'ailleurs, pour peu qu'on s'intéresse à son enfance, qui n’était pas « la vie de château », loin s’en faut, on pourrait y trouver matière à justifier sa révolte intérieure.

 

Le frondeur a de quoi en vouloir au système et à l'ordre pour  les années passées dans les pensionnat-prisons des pères maristes. Sa haine est telle qu'il doit contrôler des pulsions de violence dès qu'il croise un curé en soutane dans la rue.

L'envie lui vient - selon ses propres termes - d'aller "lui péter la gueule !"

 

Le gauchisme est cet avatar immature de la politique qui prétend rejeter la violence, mais trouve finalement plus intéressant le criminel que la victime. Et qui méprise généralement l'entourage, coupable de conformisme, surtout s'il est revanchard.

 

Gilbert Collard serait-il de cette graine ? Il porte la robe noire des hommes de loi. Mais ne porte-il pas en lui-même l’étendard noir du libertaire sans dieu ni maître ?

 

Bien qu'avide des lumières médiatiques et des procès à sensation, il ne défendra jamais les membres du groupe terroriste "Action Direct". Il se contentera, quelques années plus tard, de se ranger sagement dans les rangs du parti socialiste, qu'il avait déjà fréquenté dès l'adolescence.

 

Mais cette situation "rangée", qui tiendrait bien de "l'arrangement" n'est pas d'actualité en 1976.

Pour le moment, gilbert Collard agit avec la morale d'un "anar". Il vole au secours de l'accusé tout en clamant son horreur du crime pour mieux rouler dans la farine un brave boulanger. On prétend aimer le peuple mais au final il nous est repoussant.

 

Reste à savoir maintenant comment va réagir le père de famille bafoué. La colère populaire peut-être terrible …

 

 

 

Maitre collard 09 min8 - représailles

 

Le père de famille met finalement 15 jours avant de laisser exploser sa colère.

 

Il trouve l'adresse et se rend au domicile pour injurier et menacer de mort ... Mme janine Matteï.

 

On se demande bien pourquoi s'en prendre à cette pauvre femme dont le témoignage au procès est si désastreux qu'il n'a convaincu personne.

 

Un observateur avisé jugerai plus opportun et surement tout aussi méchant qu'il lui envoie des fleurs. Histoire de la remercier d'avoir évoqué un satyre au pull-over rouge sévissant dans les cités de Marseille auquel personne ne veut plus croire.

 

Alors, pourquoi tant de haine ?

 

Mme Matteï était ressortie meurtrie et humiliée du tribunal. Lui au contraire peut crier victoire. La peine qu'il souhaite a été requise par l'avocat général, et retenue par les jurés.

 

Les abolitionnistes répètent constamment que la peine de mort n'a aucune valeur dissuasive sur les criminels.

Pour le cas présent, elle ne semble pas non plus avoir d'effet analgésique sur les consciences des familles, vu que la furie reste intacte.

 

 

 

Maitre collard 10 min9 - catharsis

 

Répétons-nous la question,

pourquoi se déchaîner contre Mme Matteï ?

 

Chétive et tremblante en parlant au juge dans l'enceinte du tribunal, cette femme parait être le "défouloir" idéal. Le souffre-douleur sur lequel on passe ses nerfs et son mal de vivre tout en mesurant qu'on n'y prend guère de risque.

 

Le père de famille l'a bien vu au procès. Que ce soit l'avocat général ou celui de la partie civile, ils ne se sont pas gênés pour démolir les arguments de cette femme qui semblait si seule et terrorisée.

 

Ces deux hommes de loi qui parlent fort bien avec des mots choisis, n'en ont pas pour autant pris des gants quand il s'agissait d'anéantir le témoignage, allant jusqu'à la raillerie.

 

Certes, le tribunal est un théâtre où les acteurs ont tendance à surjouer. Mais celui qui est spectateur pour la 1ère fois, peut-il seulement s'en rendre compte ?

Il ressort plutôt avec l'étrange impression qu'un procès ne sert pas uniquement à juger un accusé. C'est également une lice où s'affronte le camp du mal contre celui des bons, dont on fait logiquement partie quand on est du côté de la victime.

 

Le procès, une sorte de rite "catharsique" qui vaut bien n'importe quelle psychanalyse.

Même si elle n’est guère honorable, la réaction du père de famille est donc parfaitement humaine. Si ce n’est qu’elle emprunterait volontiers les caractéristiques d’un animal : le caméléon. Tout le monde connait la réputation que l’on prête à ce reptile …

 

 

 

Maitre collard 11 min10 - mimétisme

 

Dans l'atmosphère surchauffée de ce tribunal, les hommes en robe noir déchargent leur tension interne.

Pourquoi seraient-ils les seules à lâcher cette adrénaline qui fait tant de bien sur le coup ?

 

Notre père de famille qui découvre pour la 1ère fois de sa vie un procès, a de quoi en tirer la leçon que "c'est comme ça que ça se passe".

Tout individu face à une situation inédite a pour réflexe d'agir par mimétisme. Dans un environnement qui ne lui est pas familier,  il copie son attitude sur celle des "habitués".

 

L'homme n'a guère pu le faire au cours du procès. Mais il a choisi de se rattraper.

C'est un peu comme celui qui va à son 1er bal du samedi soir et voit une bagarre à la sortie. Il s'approche de l'attroupement et lance naïvement :

"moi aussi, j'peux cogner ?"

 

 

 

Maitre collard 12 min11 - action

 

Le coup d'éclat tardif de notre fulminant requérant contre un témoin de la partie adverse ne fut pas son dernier.

Car notre homme n'est pas de ses pères de famille muré dans un silence baignant une solitude qui parle pour sa douleur.

 

Deux ans plus tard, à la sortie du livre "le pull-over rouge", il met en scène un "mini autodafé". C'est la basilique Notre-Dame de la Garde qu'il choisit pour décor. Notre "Torquemada de Massilia" brûle le livre devant le parvis.

 

Autodafé veut dire en latin "acte de foi". On ne pouvait pas mieux choisir comme endroit.

 

Cette mise en scène marque un constant manque de logique chez le personnage :

- il vitupère une témoin qui involontairement aurait plutôt servi sa cause

- il offre une publicité inespérée pour le livre qu'il voudrait voir interdire

( combien de ventes en plus ? )

 

Seul un chagrin infini expliquerait (peut-être) cette absence de cohérence ...

 

 

 

Maitre collard 13 min12 - réaction

 

Revenons au procès, en ce jour du 10 mars 1976.

Comment réagit sur le coup le père de famille à la traîtrise de l'avocat qui était supposé être dans son camp ?

 

En fait, point de colère ni même de soubresaut sur le banc de la partie civile.

Revivre les faits par leur récit en salle audience, mais aussi entendre les descriptions d'autopsie, avait peut-être bien anesthésié l'esprit et la volonté du plaignant.

 

Mais à la vérité, nul ne sera jamais s'il a vraiment compris le sens de la formule utilisée par son avocat :

"Je veux pour Ranucci un chagrin et un repentir qui ne finissent jamais."

 

Maître Collard avait-il prévu que les termes employés resteraient abscons pour le brave boulanger ?

En 2 ans il a eu le temps de jauger son impétueux client, et peaufiner la formule qui pourrait sauver l’accusé, … et lui-même !

 

 

 

Maitre collard 14 min13 - compensation

 

Qu'est-ce qui fera donc courir maître Collard de prétoire en studio radio, et d'émission radiodiffusée en plateau de télévision ?

 

Sur ce point (au moins), il ne laisse pas traîner l'intrigue et passe des aveux complets, sans pudeur. Cette notoriété médiatique compense l'affection dont il a été privé durant son enfance.

 

"Je n'ai pas été élevé dans la tendresse,

j'ai été élevé dans la discipline !" assène-t-il.

 

Et pour être sûr que l'on s'intéresse à lui, tous les moyens sont bons. A commencer par jouer de la provocation face caméra :

 

"Vos propos font sur moi l'effet de ces cigarettes au cannabis auxquelles je me garderai bien d'avoir jamais goûté."

 

Cette tirade décochée à l'un de ces détracteurs au moins aussi habile que lui montre combien gilbert Collard sait jouer de l'ambigüité avec une malice qui déstabilise. Il flirte sans complexe avec la légalité en évoquant un usage qui n'est autorisé que de l'autre côté des Pyrénées. D'ailleurs, l'avocat entretient un rapport trouble avec la péninsule ibérique ...

 

 

 

Maitre collard 15 min14 - "maestro Collardo"

 

Faut-il l'appeler "maestro Collardo" ou "el senior Collardez" ?

 

On l'a vu, l'homme sait prendre le taureau par les cornes et planter ses banderilles.

C'est en défendant un couple d'espagnols qu'il fait son entrée dans l'arène médiatique.

Même si, on le sait, en matière d'arène et de corrida judiciaire, c'est un adversaire de la mise à mort.

 

Dans cette affaire, il se montre surtout expert dans l'art de la "larga", la passe du torero qui esquive au dernier moment.

Mais il sait aussi agiter le chiffon rouge, comme quand il demandera l'avis du conseil de l'ordre du barreau pour un témoignage devant permettre la cassation.

 

Sa toute 1ère émission de télé, avant une liste jamais interrompue, il la fait également avec un espagnol, et non des moindre : Paco del Lucia. Simple concours de circonstance sans conséquence ?

 

A la disparition de la légende du flamenco en 2014, gilbert Collard, le regard lourd et le verbe lent avoue avoir perdu "un ami". Voilà un lien bien étranger entre l'homme de loi "payo" et l'artiste "gitano".

 

L'intéressé n'est plus là pour confirmer que cette amitié était aussi profonde que réelle, et ainsi faire taire les mauvaises langues qui n'y verraient qu'un moyen de donner le change.

Il est vrai que les options politiques que défend aujourd'hui le député Collard ne voient pas nécessairement comme une qualité intrinsèque ce que l'on dénomme "la diversité".

 

Seule certitude : ils étaient tous les deux "maestro" dans leur domaine respectif.

L'un dans le jeu de guitare, l'autre dans l'art du double-jeu.

 

 

 

Maitre collard 16 min15 - morale

 

Mentir par omission, ce n'est jamais totalement mentir.

Tout le monde l'a fait, ou doit le faire.

 

On reconnait parfaitement le droit à un médecin de mentir par omission. Alors pourquoi l'avocat, autre profession assermentée, n'y aurait pas droit aussi ?

 

Surtout que mentir par omission devant son client, ce n'est jamais mentir devant le juge sous serment. D'ailleurs maître Collard se plia à ce principe puisqu'il attendit le jour du procès pour révéler sa vérité.

 

Si d’un côté Maître Collard a dupé son client, il a de l’autre respecté l’éthique de l’audience, et fait honneur à la conscience humaniste.

Mais c’est aussi un habile boutiquier, qui sait appliquer le slogan « 2 morales pour le prix d’une ».

 

Le fils de notaire a autant le sens de l’équité de son père que celui des affaires.

La justice est une grande lessive.

Et d’ailleurs en 1976, une célèbre publicité, souvent raillée, voyait une ménagère refuser d’échanger son baril de lessive contre 2 autres qui n’avaient pas de marque. L’idiote !

 

Malin, maître Collard troque 1 morale professionnelle contre 2 morales déontologiques. La bonne affaire !

 

Le voilà blanchi …

 

 

 

Maitre collard 17 min16 - conscience

 

Gilbert Collard eut-il des remords pour ne pas avoir appuyé la cassation après le procès Ranucci ?

Le métier d’avocat n’est qu’une suite ininterrompue de questionnements auxquels se mêlent ceux de la vie quotidienne de tout un chacun.

 

« A quand remonte votre dernier problème de conscience ? » lui avait-on un jour demandé.

« A la semaine dernière » répond-il sans hésiter.

Puis marquant un silence, de rajouter :

«  j’ai payé très cher … un sac à main à une de mes filles ».

 

Ne laissant pas le temps à son interlocutrice de reformuler sa question, il renchérit aussitôt sur le coût ( coup ) du sac à main, comme si le sujet lui tiendrait encore à cœur.

 

Maestro dans l’art de l’esquive et même de la ré-esquive ! « olé » pour la « larga ».

 

 

 

Maitre collard 18 min17 - héros ?

 

Gilbert Collard n'offrit pas de coup de pouce juridique pour permettre un nouveau procès.

Mais il garde pour sa bonne conscience la phrase finale de sa plaidoirie qui appelait à ne pas condamner à mort.

 

Dans l'affaire du pull-over rouge, maître Collard a-t-il été un "traitre" pour la bonne cause ?

A l'image d'un oscard Schindler "félon honorable", qui joua un double jeu avec le nazisme pour sauver des centaines de juifs.

 

La différence est que Gilbert Collard n'a hélas sauvé personne. Sauf peut-être lui-même et sa réputation. Car lorsque les projecteurs médiatiques braquent leur lumière sur votre personne, d'autres vont toujours fouiner dans vos zones d'ombre pour vous priver de ce soleil bienfaiteur.

 

Surtout lorsque que vous finissez par prendre des options politiques qui longtemps n’ont pas plu à la presse en général,  et aux journalistes en particuliers …

 

 

 

Maitre collard 19 min18 - rencontre

 

Comment un avocat gagne-t-il sa croute ?

Avec les divorces bien sûr !

 

Gilbert Collard n’échappe pas à la règle. Même si en matière de déontologie, l’avocat qui ne peut rien faire comme les autres à bien sûr droit à des situations hors norme.

 

Au milieu des années 80, il traite une affaire des plus cocasse.

Un homme plutôt fortuné se sépare de sa femme, lui enjoignant d’aller gagner sa vie en faisant des ménages. Le prenant au mot, on la voit briquer le parquet à 4 pattes … très dénudée sur des photos parues dans un magazine masculin.

 

Pour négocier la séparation, c’est auprès de maître Collard que l'épouse vient prendre conseil. Par la même occasion sa fille passe également le voir pour des renseignements. Etudiante en droit, elle aimerait intégrer le métier.

 

Quel cabinet choisir, combien ça gagne, quel domaine à la côte, etc…  Les interrogations sont évidentes. Et pourtant gilbert Collard ne retiendra en tout et pour tout qu’une seule des questions que lui pose la jolie blonde de 19 ans :

« Christian Ranucci était-il coupable ? »

 

Par la suite, l’un et l’autre seront amenés à se côtoyer régulièrement. Marion-Anne, ainsi se prénomme-t-elle, devient finalement avocate. Mais c’est hors d’une salle des pas perdus qu’ils se croisent.

 

Il faudra attendre encore, le temps qu’elle quitte le métier. Et qu’elle se fasse un nom en politique, et surtout un prénom : Marine.

 

 

 

Maitre collard 20 min19 - destins croisés

 

Il y eut une 1ère rencontre, mais il aurait pu y avoir une retrouvaille. Les hasards de la vie auraient bien pu faire que gilbert Collard retrouve son client de l'affaire Ranucci.

Sur les gradins d'un stade par exemple. Mais pas pour assister à un match de foot.

 

Dans les années 80, l'ancien boulanger a sa place d'honneur dans les meetings frontistes marseillais. Il incarne la figure emblématique de victime de cette violence qui gangrène le pays. Mais les années faisant, et début de "dédiabolisation" oblige, son image devient embarrassante.

 

C'est cette même dédiabolisation qui conduit maître Collard à prend la couleur politique qu'on lui connait aujourd'hui. Comme si le changement d'image du FN, aujourd'hui devenu "Rassemblement National", déroulerait le tapis rouge à un personnage flamboyant, tout en guidant vers la sortie le pyromane du "pull-over rouge".

 

Gilbert Collard a connu bien des errances politiques, allant jusqu'à flirter avec les trotskystes. L'ancien frondeur se défend alors pourtant d'être frontiste. Il se définit plutôt comme "mariniste". Et c'est sous cette bannière qu'il gagne son 1er vrai mandat électoral.

 

Mais est-ce bien cela qui fait maintenant sa notoriété ?

 

 

 

Maitre collard 21 min20 - probité

 

Aujourd'hui maître Collard a fait son chemin. Au point d'être devenu l'avocat le plus connu de France.

Pourtant, on ne le voit guère plus exercer dans les prétoires.

 

Si son nom est largement passé en notoriété devant les Kiejman, Badinter ou Klarsfeld,  c'est pour beaucoup, reconnaissons-le, grâce à son intronisation dans le panthéon télévisuel des "guignols de l'infos". Ces marionnettes le firent tant rire, avant qu'il n'ait lui-même droit à sa représentation en latex.

 

"Vous les trouvez encore drôle ?" lança-t-il, la morgue dubitative, aux autres invités au cours de l'une de ses apparitions télé. Tout comme l'avocat interroge les jurés dans les séries judiciaires américaines. Ces marionnettes finirent par disparaître du petit écran, mais certainement pas lui.

 

Petite victoire.

 

Quoi qu'il en soit, son attitude et ses propos du 10 mars 1976 au tribunal d'Aix conditionnèrent tel un pari la suite de sa carrière. En une phrase finale, il jouait son avenir.

 

C'est ainsi qu'il put réaffirmer son opposition toujours intacte à la peine de mort en faisant ses 1ers pas dans l'hémicycle de l'assemblée nationale en qualité d'élu.

Sur ce point au moins, et nul ne peut venir le contredire. Son passé témoigne autant de sa cohérence que de sa probité. 

 

 

 

 

 
  • 3 votes. Moyenne 2.4 sur 5.

Ajouter un commentaire