l'anniversaire

 

L anniversaire 01christian Ranucci signe des aveux où sa date de naissance est fausse

 

cette « bizarrerie » a son explication

 

mais elle amène à d’autres questionnements

 

 

 

 L anniversaire 02jour J

 

christian Rannuci est né le 6 avril 1954.

Etrangement, les aveux qu’il signe mentionnent le 6 juin.

Pourquoi cette erreur qui apparait dès la 1ère ligne du procès-verbal ?

 

Ce décalage de date de 2 mois trouve une explication simple. Les aveux sont signés un 6 juin.

Confondre la date de naissance de l’inculpé et celle du jour : voilà qui augure dès le départ un manque de sérieux. A moins de le mettre sur le compte d'une fatigue du rédacteur au bout des 18 heures de garde à vue.

Mais une étrange similitude peut bien donner un coup de pouce à la méprise :

6 avril 1954 : naissance de christian Ranucci

6 juin 1944 : débarquement en Normandie

Il faudrait être obnubilé par « le jour le plus long » pour confondre les deux dates. Mais justement, les conditions sont parfaitement réunies. 

 

 

 

L anniversaire 03calendrier

 

L’affaire Ranucci est pleine de coïncidences extraordinaires.

Sauf pour ceux qui croient en sa culpabilité bien sûr.

Mais ils ne pourront pas nier la similitude entre sa date de naissance, et celle d'un fait historique. Et c’est justement au moment où arrive la commémoration de cet évènement que christian Ranucci est interrogé. Il signe ses aveux le jour même où l’on fête les 30 ans du débarquement allié en Normandie. Ce pourrait-il que cette célébration provoque la « coquille » dans la 1ère ligne des aveux ?

Il suffit de se replonger plus en détail dans l’actualité de ce jour décisif pour comprendre le déclic.

 

 

 

L anniversaire 04omerta

 

Le 6 juin 1974, le « jour le plus long » quitte sa chape de plomb.

Car longtemps l’évènement a été minoré, et même occulté.

Les directeurs de l’information le savaient. Sous la présidence Gaullienne, mieux valait parler du 18 juin 1940 et son fameux appel radiophonique, plutôt que du 6 du même mois 4 ans plus tard.

La faute à qui ? Winston Churchill.  L’homme au cigare avait mis le général de la France libre sur la touche pour l’opération « overlord ». Le recalé n’avait jamais pardonné.

En 1964, le 1er ministre et futur successeur, George Pompidou tente vainement de convaincre son président d’assister aux commémorations : « c’est quand même les 20 ans ! »

Peine perdu, le général qui flattait tant les anciens combattants refuse de se rendre sur les plages de Normandie pour l’évènement. Il y a des rancœurs qui sont tenaces…

Mais en 1974 tout change : nouveau président + «  les 30 ans ». Du coup les médias enfin se lâchent, et  même ne parlent plus que de cela. Trop longtemps bridé, le journal télévisé va jusqu'à s’autoriser une édition spéciale et en direct des plages normandes.

Autant dire qu’avec ce martelage médiatique,  le jour J est imprimé dans tous les esprits. Et pour le personnel de l’hôtel de Police de Marseille, pas de raison qu'il échappe à cette exultation collective.

 

C’est ainsi que christian Ranucci se voit « rajeunir » de 2 mois par une erreur d’écriture.

Une anecdote plutôt badine pour une affaire aussi terrifiante ?

Le détail en tête du formulaire d'aveux n'est pas si futile que ça …

 

 

 

L anniversaire 0520 ans

 

Un inculpé qui signe des aveux à un droit, et même un devoir.

Celui de relire ses déclarations avant de poser sa griffe en bas de page.

On veut bien croire qu’après 18 heures de garde à vue, on n’a pas forcément l’esprit très clair.

Mais de là à oublier sa date de naissance !

Surtout que christian Ranucci a sur lui de quoi lui rappeler son anniversaire, 2 mois avant. Sa chemise à rayures bleues et blanches, celle qu’il porte à l’interrogatoire, celle que l’on a tous vu dans le seul film où il apparait : c’est un cadeau d’anniversaire de sa marraine.

Si christian Ranucci relit ses aveux avant de les signer, alors il est sensé découvrir dès la 1ère ligne que c’est aujourd’hui son anniversaire, et qu’il a de nouveau 20 ans !

Pourtant :

« on n’a pas tous les jours 20 ans, 

ça n’arrive qu’une fois »

dit la chanson interprétée par berthe Sylva.

L’inculpé est d’une psychologie trop particulière pour éluder ce genre de détail.

 

 

 

Le courage 05discordance

  

Christian Ranucci avait une bizarrerie.

Il pouvait se montrer extrêmement tatillon sur des faits a priori insignifiants.

En revanche, il affectait de l'’indifférence pour des éléments bien plus graves.

  

C’est maître Le Forsonney, son avocat qui s’en rend compte le premier. Il le voit s’emporter au cours d’une discussion quand on lui reproche de ne pas avoir respecté le stop au carrefour de la Pomme. Comme s’il était incarcéré pour une simple effraction routière avec délit de fuite !

 

De nouveau, il monte sur ses grands chevaux à son procès. Des juges perplexes le voient s’époumoner pour signifier qu’il avait passé la nuit à Marseille la veille de l’accident, et non pas à Salernes, comme l’on retenu les policiers.

 

Dans ces conditions, une erreur dans sa date de naissance aurait dû lui sauter aux yeux. Et les policiers n’auraient pas fait trop de difficulté pour rectifier ce détail.

 

Dans les films, le policier relit rapidement ses aveux à l’inculpé avant de les lui faire signer. Un moyen cinématographique fort pratique pour résumer la situation au spectateur. Ce n’est guère protocolaire et surtout pas la réalité. En principe.

Mais si dans l’affaire Ranucci la fiction a pu rejoindre le vécu, il y a de quoi comprendre que l’inculpé n’ait pas vu que sa date de naissance était fausse. Si on a pris la liberté de lui relire le procès-verbal bien sûr.

 

 

 

L anniversaire 07souffle

 

Les policiers sont au moins coupables d’une chose.

Ils ont oublié de souhaiter à christian Ranucci un « joyeux anniversaire !».

C’est quand même eux qui le font naître (ou renaître) un 6 juin.

Le "cadeau", ce sera avec la juge d’instruction. Une inculpation pour enlèvement et meurtre.

 

Une situation qui n'est pas sans rappeler une scène clef du film de michel Drach « le pull-over rouge ». Le passage silencieux en noir et blanc durant le procès. Celui où un gâteau d’anniversaire traverse l’allée centrale du tribunal. La pâtisserie est portée par des mains qui pourraient bien être celles de dame la mort. Le gâteau est amené jusqu’au box de l’accusé qui en souffle les bougies.

Le plan est une métaphore poignante de cette vie encore jeune qui va partir comme une flamme qu’on éteint. Un instant de génie du réalisateur, pour un moment cinématographique d’une violence émotionnelle intense.

 

 

 

L anniversaire 08conclusion

 

Le 6 juin 1974, fin de sa garde à vue, fut pour christian Ranucci « le jour le plus long ».

Il ne le sait pas encore, mais c'est bien là qu'il y laisse la vie.

 

Gilles Perrault, auteur du « pull-over rouge » a également écrit « Le secret du jour J ». L’article dont vous avez lecture aurait pu s’intituler : « le secret du jour J + 30 ans ».

C’est un bien petit secret dans les mystères et zones d’ombres de l’affaire Ranucci. Mais c’est un grand flou sur la manière dont l’inculpé prend connaissance de ses aveux.

Dommage que les avocats ne se soient pas servi de ce détail. Il y avait de quoi montrer que l’on avait fait signer n’importe quoi à leur client.

 

 

 

 

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