2024 : le récapituleur
Pour les 50 ans de l’affaire Ranucci, un nouveau venu s’invite dans le débat. Jeune journaliste, dans le métier depuis 6 mois, il explore le dossier de manière a priori inédite.
Sa démarche : s’attaquer aux écrits de gilles Perrault. Mais aussi à ceux de chrisitian Ranucci lui-même, son "récapitulatif".
Pour des raisons de commodité, nous appellerons ce journaliste "le récapituleur".
Faut-il le prendre au sérieux ?
publication
Environ 25 ans, journaliste régional depuis 6 mois, et déjà publié déjà dans un hebdomadaire national.
Bravo, chapeau monsieur « le récapituleur » !
Son long article est sorti le 3 juin 2024. La date coïncide bien sûr avec le 3 juin 1974, jour de l’enlèvement de la petite marie-dolorès Rambla.
Que nous dit le récapituleur dès le préambule :
« La culpabilité de christian Ranucci reste la thèse largement la plus crédible. Sauf pour une partie des lecteurs du pull-over rouge. »
Dès ce stade, ça sent un peu la mauvaise foi …
impact
« …une partie des lecteurs du pull-over rouge ».
Si seuls ces lecteurs croient en l’innocence, ils doivent quand même compter. Quand on sait que le livre s’est vendu à plus de 1 million d’exemplaires, hors rééditions.
Le film sorti en 1979 totalisait 1,4 millions d’entrées. Sans compter en 2010, l’édition en DVD/blue Ray qui consacre le film comme appartenant à la mémoire du cinéma français.
Rajoutons à ces productions, tous les sites internet consacrés à l’affaire et qui défendent l’innocence. Tant et si bien qu’un culpabiliste patenté, qui n’est autre que xavier-marie Bonnot, a parlé de véritable «Ranuccimania ».
Et pourtant, pour le récapituleur, gilles Perrault de qui tout est parti ne serait qu’un « auteur de fiction ».
De quelle fiction parle-t-on ?
scénario
Le témoignage des 2 toulonnais qui disent avoir aperçu le tueur avec la fillette est le suivant :
« Il a escaladé la colline avec l’enfant. Il aurait dit quelque chose comme « pas d’inquiétude, je reviens » ».
S’il s’agit de christian Ranucci, sa voiture est en contrebas. Avec la plaque d’immatriculation, c’est comme s’il laissait sa carte de visite pour qu’on vienne le retrouver.
Quel scénariste irait valider un récit aussi tordu ?
A priori pour le récapituleur, ça ne pose pas de problème. Il valide ce témoignage rocambolesque.
En revanche, chercher à comprendre ce qui s’est réellement passé, trouver une explication plus crédible, pour le jeune journaliste ce serait faire de la « fiction ».
Drôle d’inversion !
méthode
On en vient à ce qui explique le pseudonyme du polémiste.
Le jeune journaliste s’attaque à ce que personne n’avait osé auparavant : le récapitulatif.
Il s'agit des écrits rédigés par Christian Ranucci durant ses 784 jours d’incarcération.
Le journaliste veut y déceler ce qui pourrait lui paraître des invraisemblances.
Rappelons que ces lignes furent rédigées dans un contexte de stress permanent, qui feront écrire à son auteur : « ce long internement m’a usé ».
Dès ce stade, le « match » semble déséquilibré.
Car le journaliste, confortablement installé devant son PC va démolir tout ça.
« les idées tournent et retournent comme moi dans la cage ou je suis » raconte le condamné. Pour autant le journaliste semble négliger la distance salutaire et la réserve nécessaire envers le récit d’un jeune homme soumis à une torture morale permanente. L’écriture est d’abord pour christian Ranucci une tentative de soulagement. Vouloir détruire son argumentaire, c’est aussi courageux que frapper un homme à terre.
Mais là ne s’arrête pas la manœuvre : le journaliste veut comparer le récapitulatif avec l'argumentaire développé dans le « pull-over rouge ». Pour voir si « on dit la même chose ».
A quoi joue-t-il ?
magouille
Avec le récapituleur, on a droit au « thierry Meyssan » de l’affaire Ranucci.
Rappelons qui est thierry Meyssan.
C'est l’homme qui s’est fait connaître en déballant que le 11 septembre était un vaste complot.
Selon lui, tout était faux. Une magouille de la CIA, si on doit le croire.
Comment le démontre-il ?
Thierry Meyssan use de la méthode que reprendra le récapituleur. La 1ère partie de son livre est une compilation détaillée des divergences entres les articles pris dans différents journaux relatant la tragédie du World Trade Center. Un travail méticuleux qui remplit la moitié du bouquin. Le plein de contradictions inévitables étant fait, arrive la question fatidique : « vous ne trouvez pas qu’on nous ment ? ».
C’est après qu’il peut asséner « sa vérité ». Le 11 septembre serait un complot « des puissances économiques pour permettre l’entrée en guerre et faire fructifier certains marchés ».
On s’y attendait …
Le récapituleur adopte cette manière d’éplucher les écrits. Les différences entre le mémoire de christian Ranucci et l'analyse de gilles Perrault doivent instiller dans les esprits l’idée que tout cela sonne faux. Il trouve matière, naturellement. Heureusement d’ailleurs, car il n’y a pas de raison que le condamné et l’écrivain puissent avoir exactement le même point de vue.
conclusion
Seul le début de l’article du récapituleur est offert au public. Le reste est réservé aux abonnés.
Cela vaut-il la peine d’aller plus loin ? Quand on utilise les même ficelles grossières qu’un ouvrage qui affirme qu’aucun avion ne s’est écrasé devant le pentagone le 11 septembre 2001, on ne marche pas.
D’ailleurs, l’hebdomadaire Marianne dans sa grande prudence s’est contenté d’ouvrir ses colonnes numériques à la libre expression du récapituleur. Saluons la probité de la Rédaction du journal qui dans sa grande sagesse s’est abstenue d’offrir la publication papier à l’auteur.
N’est pas gilles Perrault qui veut, pas plus que son contradicteur.
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